Sur la platine hier...
Deux ensembles similaires hier soir (tous deux sur ECM), mais deux musiques fort différentes.
Deux duos trompette/guitare électrique, appuyés par des sections rythmiques basse-batterie.
D'abord, le guitariste "frippien" David Torn et le trompettiste Mark Isham, appuyés par la section rythmique de King Crimson circa 1980, Tony Levin et Bill Bruford. Ce disque échappe à l'esthétique ECM, tant dans sa pochette que dans son "son" (d'ailleurs, l'enregistrement n'est pas de Jan Erik Kongshaug, l'ingénieur de ECM, qui n'a fait que le mixage): la musique est dense, l'esthétisme incorpore des touches d'ambiant et de world beat à des échanges virtuoses des deux instruments solo. Ce n'est jamais inintéressant, mais c'est un peu trop jazz fusion à mon goût, dans le sens de compos qui manquent de centre de gravité; trop de solos, manque d'ambiance. Je ne suis pas un fan de Bill Bruford sur des percus électroniques, ça manque de ventre. Bon, c'est des virtuoses. et vers la fin, il y a un double-titre (The Network of Sparks) où les dosages semblent enfin "prendre": le beat, l'ambiant et les solos nous font finalement voyager sans discontinuité. Faudra que j'y retourne, peut-être que c'est plus intello que ce que je suis capable d'assimiler à froid. Un mot sur le son: on réalise toute la qualité des ECM de Kongshaug en entendant un disque qu'il n'a pas endisquer: le son est touffu, presque confus, et la prise de son manque d'air. Il manque la physicalité et le sens de l'espace qu'on en est venu à associer à ECM avec les années.
Après, sans m'en rendre compte, j'ai repris la même formation: trompette, guitare électrique et section rythmique sans piano. Mais nous sommes ici en présence d'un quatuor parfaitement intégré et à l'esthétisme très fort: le coeur rythmique de Arild Anderson (le contrebassiste des premiers ECM) et Patrick Héral donne à ces compos abstraites le centre de gravité qui semble tant manquer au Torn. Anderson a un son magnifique et une inventivité mélodique qui ne se dément jamais. Markus Stockhausen, leader du quatuor et trompettiste, injecte des solos qui sont comme de brusques éclats de lumière blanche. Plus en retrait, le vieux Terje Rypdal, à la guitare électrique, est le complément parfait du trio: quand il ne donne pas une couche d'ambiant music, il se lance dans des solos tranchants et énergiques. Surtout, ces 4 musiciens, évoluant sans mélodie , semblent en parfaite synchronicité. C'est abstrait, mais c'est beau, beau, beau. Plannant par moments, très énergique par d'autres, c'est 60+ minutes d'un trip dans un paysage scandinave très ECM, mais avec des dosages parfaits. Et l'enregistrement de Kongshaug : wow! J'adore! Ce Karta est un bien beau trip! Et aux deux bookends du disque, deux magnifiques compos ambiant de Andersen, Sezopon et Lighthouse. Tout est bon, y'a rien à jeter.
Pour finir, j'ai mis Here Comes The Flood de Peter Gabriel, version Robert Fripp (album Exposure): la voix de Gabriel sur fond de Frippertronics, ça me semblait une belle fin. Belle compo, belle interprétation. Mais après la magie sonore de Karta, bon sang, on aurait dit le son d'un vieux phonographe!
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