samedi 29 août 2009

REMASTERINGS LES PLUS EXCITANTS À VENIR - #3 KING CRIMSON

   
KING CRIMSON en multi-canal? Excitant! Surtout avec un mixeur aussi habile, crédible et artistiquement engagé que Steve Wilson, la tête pensante de Porcupine Tree. Mais ces rééditions (déjà une 5e série de rééditions pour King Crimson!) ont d'autres raisons d'exciter les fans du groupe progressif le plus important de l'histoire du rock.

Pour ce qui est d'exploiter à fond son catalogue, peu de personnages sont aussi habiles que Robert Fripp! Mais contrairement à Genesis par exemple, ses pensées artistiques et commerciales savent se marier et nous offrir des produits excitants, à prix compétitifs, et sans nous donner l'impression de nous arnaquer!

Il y a longtemps que Fripp a compris l'opportunité que représentait l'Internet pour une intelligence comme la sienne. Le site DGM Live (Discipline Global Mobile) est extrêmement vivant et permet au créateur en lui de contrôler la distribution de son matériel, de le repackager, voire de nous permettre d'en suivre la conception (excellent blogue). Et cette fois, DGM frappe fort.


Le 21 septembre, ce sera donc la 4e réédition digitale de Red, mon Crimson préféré et disque-testament du "power-trio" Fripp-Wetton-Bruford, qui fut rejoint par l'occasion de quelques-uns des membres les plus éminents de la première période de King Crimson, dont le grand saxo Mel Collins et monsieur Mellotron lui-même, Ian McDonald. Et outre des versions 5.1 DVD-A mixées par Steve Wilson (pièces bonus comprises!), et une couche 2.0 Hi-Res (24/96) du mixage originale, on aura droit à des suppléments: une version complète de Providence (qui, il est vrai, était coupé en plein élan sur le Red original), des versions "power trio" (sans overdubs) de Red et Fallen Angel ainsi qu'un titre supplémentaire: Journey to the Center of the Cosmos. Et à quoi bon le DVD-A s'il n'y a pas du vidéo: nous pourrons voir une performance de 1974 pour la télé française de Larks’ Tongues in Aspic II, The Night Watch, Lament & Starless. Ça promet!


12 octobre. C'est ici que les choses deviennent, à mon sens, encore plus intéressantes. Avec la sortie des multiples nouvelles éditions de In The Court Of The Crimson King, le premier King Crimson, qui allait faire un tel impact sur l'histoire du rock progressif.

Pourtant, il y a à peine 4 ans, Robert Fripp annonçait la sortie de la Master Edition, suite à la redécouverte des bandes maîtresses originales, et on semblait avoir étiré la sauce au maximum du péché original sous forme de Mellotron. Mais la présente édition s'annonce beaucoup plus excitante. En effet, outre un mixage 5.1 DVD-A et un remastering Hi-Res stéréo de la Master Edition, outre de copieux bonus (sur lequel nous reviendrons) et un peu de vidéo, on annonce un nouveau mixage stéréo exécuté par Steve Wilson et Robert Fripp.

Et pourquoi s'exciter pour un nouveau mixage stéréo, après avoir grandi en écoutant le mix original, qui fait maintenant partie de notre ADN musical? Pourquoi trouver l'idée excitante après avoir exécré la décision de Genesis de faire des nouveaux mixages stéréo pour ses SACD?

Parce que on a beaucoup plus confiance en Steve Wilson et sa déférence à King Crimson qu'en Nick Davies qui a voulu "moderniser" le son Genesis.

Parce que le mixage original demeure disponible, ce quie st une preuve de respect envers les fans.

Et surtout parce qu'il y avait une sacrée bonne raison de le faire.

En 1969, en enregistrant In The Court, les membres de KC ont surexploité leur console 8 pistes et ont eu un recours régulier au "bouncing"... c'est à dire qu'après avoir rempli une première bande 8 pistes, celle-ci était pré-mixée et couchée sur une ou deux pistes d'un nouveau 8-pistes, puis les pistes restantes étaient à leur tour utilisées. Et comme on est en 1969 dans un monde analogue, à chaque "bouncing", on perd une génération. Répétez le procédé 3 ou 4 fois et vous vous retrouvez avec le son de KC à l'époque: excitation, mais aussi distorsion et bruit de fond assez important au final.

Ces limites n'ont plus de raisons d'autres. Et même si ça a dû représenter un travail de moine incroyable, Fripp & Wilson sont retournés dans les 8-pistes originaux pour recréer ces mixages, qui seront donc entendus pour la toute première fois avec des sources de première génération.

Voilà de quoi exciter l'audiophile en nous!

Bon, et les bonus? Déjà une controverse. Robert Fripp, qui aime bien les éditions abrégées de ses pièces (affreuse et impardonnable édition de Starless dans le coffret Frame by Frame!), a abrégé Moonchild, qui a perdu un peu plus de 2 de ses 12 minutes originales dans le nouveau mixage stéréo. La version originale de 12 minutes demeure en bonus cependant. Autre bonus: une version flûte (Ian McDonald) et guitare (Fripp) de I Talk To The Wind, une autre version du même titre avec des solos inédits, les "backing tracks" de Epitaph ainsi que des extraits de la session d'enregistrement de la curieuse intro (les vents) de 21st Century Schixzoid man.

Et côté vidéo? Une performance de 21st Century à Hyde Park, à Londres en 1969.

Bon, mais attention: il y a tellement de configurations et d'éditions qui seront mis en vente ce jour-là que je renonce à toutes les décrire! Pour le fanatique fini, il y a une édition de 5 CD et 1 DVD-A (!!!) comprenant entre autres un mixage mono promotionnel du disque et le bootleg d'un spectacle new-yorkais!

Vous voulez saliver et vous perdre dans le dédale de ces rééditions spectaculaires? Cliquer ici, et remarquez les prix plus que raisonnables! Robert Fripp, you da man!

Finalement, la réédition de Lizard est annoncée pour le 26 octobre, et là encore, il y aura un remix stéréo... Mais nous aurons bien le temps d'en reparler!

Beatles remastered: autre critique dythirambique

  

Extrait du magazine Uncut, sous la plume de David Cavanagh

The key word is clarity. Not loudness. Clarity. The voices and instruments are crystal clear, pure, human, natural (except, of course, when filtered through psychedelic effects) and stripped of several decades’ worth of detritus and dust. It’s as if we’ve been visiting an art gallery to gaze in wonder at a masterpiece all these years, and then suddenly an attendant comes along with a sponge and wipes the painting from top to bottom. The techniques of mastering have been controversial in recent years, with accusations (and proof, indeed) that music is being ‘brickwalled’: compressed to headache-inducing levels in order to give albums an ersatz loudness. Had these CDs come out in 1999 or 2000, as many of us were hollering for them to do, it’s likely they would now need remastering again.

It’s a weird thing to say, but Apple’s frustrating procrastination has turned out to be a lifesaver for these albums. Remastered by a small team of Abbey Road engineers over a four-year period, the CDs have not been brickwalled or over-compressed (unlike the 2000 compilation 1, which sounds unpleasantly ‘glassy’ in comparison), and nor do they even sound particularly loud (unless you turn them up). The two that have been restored to the point of miraculousness and beyond, The White Album and Abbey Road, are the ones I’d recommend first to people on limited budgets. Abbey Road’s Long Medley is simply a breathtaking musical tapestry. When it has to rock, it rocks. When it needs to be subtle (there is much more to the transition between “You Never Give Your Money” and “Sun King” than we previously thought), it has a warm, heavenly glow.

Of course, one could argue that any old rubbish would sound impressive on Abbey Road’s state-of-the-art, quintessentially expensive speakers. Perhaps we should all calm down a bit, chum. Will your so-called ‘clarity’ be detectable on a normal, high-street CD player, or on an iPod? It should, and it will. It’s not a question of surreptitious noise removal, or peak elimination, or making Magical Mystery Tour sound like MetallicaThe Beatles’ voices to the microphone: all of these are evident and undeniable. As a result, almost every album comes as a shock. They haven’t had plastic surgery. They’ve taken their masks off, and we didn’t even know they were wearing one.

History rewritten? No – history written honestly, truthfully, transparently, exhilaratingly, with no omissions or obfuscations. The Beatles up-close and personal. With blisters on their fingers.
La rumeur (non vérifiée) veut que le coffret mono soit presque épuisé. On verra bien!

HENDRIX chez SONY/LEGACY: excellente nouvelle!


 
Une nouvelle qui pourrait nous valoir de très beaux moments de mélomane et d'audiophiles: Experience Hendrix et Sony Legacy vinnent d'annoncer leur partenariat pour de futures rééditions des trois albums studio de Jimi Hendrix ainsi que du "live" Band of Gypsies.

Pourquoi est-ce une bonne nouvelle?
  • Parce que Sony/Legacy a un historique impeccable en termes de rééditions, tant du point de vue packaging que qualité sonore.
  • Parce que Vic Anesini et Mark Wilder, les ingénieurs de mastering chez Sony/Legacy, font vraiment dans la qualité.
  • Parce que le catalogue de Jimi Hendrix sur CD est un sacré foutoir, et qu'il est grand temps que des éditions définitives viennent remplacer les meilleures éditions digitales, qui datent déjà des années '80 (ça vous rappelle pas les Beatles?).
  • Parce que les mixages mono des deux premiers albums n'ont jamais été disponibles sur CD, et qu'il est temps d'y rémédier (ça vous rappelle pas les Beatles ça aussi?)
  • Parce que les remasterings récents de Experience Hendrix, opéré par (le très sympahique) Eddie Kramer (qui était déjà l'ingénieur de son de Hendrix à l'époque) cèdent à tous les maux des mastering modernes: EQ dur et compression (ça vous rappelle pas... à peu près tout le monde?).
Les sorties des Deluxe Editions de Are You Experienced?, Axis: Bold As Love et Electric Ladyland sont annoncées pour quelque part en 2010.

jeudi 27 août 2009

BEATLES - les 1ères critiques apparaissent!

Ça y est! 
Certains chanceux ont déjà les coffrets des remasterings des Beatles entre les mains.

Et une première critique, de ToneAudio, s'avère fortement positive. Un extrait:
For the majority of listeners, however, any temptation to spend hundreds of dollars on rare vinyl pressings should erode as they become acclimated to what often resembles hearing familiar records for the very first time. Such are the near-miraculous improvements in the key areas of information retrieval, hidden details, palpable physicality, expanded midrange, transient presence, and frequency response. (...)
What does matter, of course, is the sound. And it’s largely excellent, improving in accordance with time, parallel to advances in recording technology and the band’s groundbreaking studio techniques. As previously mentioned, every Beatles album through The White Album was mixed with the purpose of being heard in mono. (...)
Without diminishing the value and impact of the stereo editions, which blow away their 1987 digital predecessors in every imaginable facet, the mono discs are where it’s at for experiencing the Beatles in the most “authentic” manner. (Officially, no compression or de-noising was used on the mono mixes; a sum total of less than five minutes of de-noising graces the stereo editions.) Specifically, the group’s early records tend to sound unnatural in stereo, as the hard panning seems forced and artificial—which, in actuality, it is. In mono, the Beatles’ music thrives from ultra-dynamic front-to-back layering that, intentionally or not, often gives the impression of a stereo mix. The changes wrought by the remasters are dramatic.(...)
it sounds so good, it’s almost difficult to believe this is the Beatles, which, unless one had unlimited funds for collectable LPs, have never sounded great. Depending on one’s perspective, such a conclusion is the ultimate sign that the folks at Capitol and Abbey Road Studios not only succeeded but surpassed most expectations. For if the Beatles remasters signify the last great hurrah of the compact disc, at least the format is going out in style.
Bob Gendron, ToneAudio
 For if the Beatles remasters signify the last great hurrah of the compact disc, at least the format is going out in style. J'adore!


Un post particulièrement intéressant d'un membre de l'équipe des ingénieurs qui ont eu la périlleuse tâche de préparer les éditions définitives des Beatles sur CD: cliquer ici.

Remasterings - la liste des rééditions les plus attendues... revisitée #5

  
Bon, pour la 5e réédition la plus attendue, vraiment, il y avait mieux à trouver au calendrier que la réédition des trois albums de UK.. De toute façon, en tant qu'ancêtre génétique de Asia, UK ne devrait jamais être mentionné dans cette chronique. Laissons Claude Rajotte expédier John Wetton au cimetière des CDs et tournons-nous vers une réédition autrement plus attendue, excitante et indispensable: les grands-papas du techno, les parrains de la période berline de Bowie, j'ai nommé le vénérable ensemble KRAFTWERK.

Vous ne connaissez pas Kratwerk? Mais oui, vous les connaissez, parce que vous les entendez dans leur héritage immense. Leur ADN musical est littéralement partout dans le monde électro. Et on ne saurait mieux les résumer que leur propre communiqué de presse, alors citons-le:

Electro Pioneers, living legends and globally revered masters of electronic sound, celebrate the 35th anniversary of their landmark 1974 hit ‘Autobahn’ by releasing digitally remastered versions of eight astounding albums on 5th October 2009. Rolling back musical barriers with every forward-thinking phase of their career, Dusseldorf's Zen masters of electronic minimalism laid the foundations for four decades of computerised pop and dance music. By chain reaction and mutation, they have influenced generations of artists in all genres, mapping musical futures yet to come. From Bowie to Daft Punk, Aphex Twin to Portishead, Dr Dre to LCD Soundsystem, and almost everyone in between, the mark of Kraftwerk is endless, endless.

In 2009 Kraftwerk have upgraded their Kling Klang masters with the latest studio technology and these eight magnificent recordings still sound like nothing else in the history of music. Kraftwerk are unique, pristine, profound and beautiful. Decades may pass, but their streamlined synthetic symphonies stand outside time, as fresh as tomorrow, transcendent and sublime.

Le 5 octobre, après des années d'attente (et après l'avortement forcé d'un boxset en 2004 pour cause de qualité de remastering exécrable, selon les membres du groupe), les créateurs de la pop music électronique sortiront donc un coffret intitulé joliment: 12345678 The Catalogue, comprenant, vous l'aurez deviné, 8 disques:
  • 1974 Autobahn, 
  • 1975 Radio-Activity
  • 1977 Trans-Europe Express
  • 1978 The Man Machine 
  • 1981 Computer World
  • 1986 Techno Pop
  • 1991 The Mix (coompilation de remix)
  • 2003 Tour De France
Des versions individuelles sur CD, des versions vinyles ou des versions téléchargeables seront aussi mis en vente à cette date.

Mais soyez avertis: des problèmes de licence américaines empêcheront les sorties individuelles de trois de ces albums: Computer World, Techno Pop, et The Mix, qui ne seront donc disponibles en versions remasterées que dans ce coffret!


Et finalement, pour ceux qui aiment leur Kraftwerk vraiment robotique, les versions allemandes des albums seront également disponibles! En Allemagne, bien sûr!


Restera à rééditer les trois premiers albums du groupe, très prisés de ceux qui sont "deep" dans leur groove électronique.

Remasterings - la liste des rééditions les plus attendues... revisitée #6

  
La grande saison des rééditions approche à grands pas et avant même d'avoir eu le temps d'écrire la deuxième partie de cette chronique, voilà qu'on veut déjà la revisiter... Faut dire qu'on vit une époque exigeante et excitante, côté rééditions, alors qu'apparaissent côte à côte des rééditions affreusement compressées de grands albums du catalogue (les Rolling Stones post-Let It Bleed, Genesis), victimes de la "loudness war", et des rééditions "mono", ce mot qui, il n'y a pas si longtemps, était banni du lexique audiophile. Comme quoi il ne faut jamais désespérer, l'être humain est plein de surprises.

RÉÉDITION LES PLUS ATTENDUES - 
#6 les titres de AUDIO FIDELITY (revisitée)

L'étiquette dans laquelle officie Steve Hoffman, le plus médiatisé des ingénieurs en remastering, ne cesse de nous surprendre, par son choix éclectique et très inégal de titres. La bonne nouvelle, c'est l'annonce (comme les lecteurs de ce blogue le savent) de la réédition du mix mono du fameux disque de John Mayall, Eric Clapton and the Blues Breakers... nous prouvant hors de tout doute que AF est à l'écoute des audiophiles, ou à tout le moins des audiophiles sur le forum de Steve Hoffman. Des mixages mono inédits en CD, il en pleut et si le monde audiophile s'ouvre à la possibilité mono, tout un pan de la culture pop mondiale pourrait vivre de belles heures: Rolling Stones, Hendrix, Otis Redding, les Doors, Frank Sinatra (dont le Only The Lonely sur Mobile Fidelity fut un franc succès artistique), Buffalo Springfield, Motown, les 45-tours des années '60, etc...


Mais les sorties du mois d'août du label furent pas mal moins ragoûtantes. Pourquoi encore nous asséner des rééditions des Doors, le catalogue le plus sur-exploité du rock? Tout simplement parce que les deux titres réédités, The Soft Parade et Morrison Hotel, étaient les deux seuls titres du catalogue original à n'avoir jamais été remasterés par Steve Hoffman, du temps du label DCC. Un trou historique donc, qui fut comblé. Et puis, ce sont les mix originaux, disparus du catalogue aujourd'hui. 
La spectaculaire fusion orchrestrale-blues-psychédélisme sonne bien, y'a pas à redire, mais Bernie Grundman avait aussi fait un bon boulot en 1999!  The Soft Parade est-il en rétrospective un meilleur album? Touch Me, Wild Child, Shaman's Blues nous montrent un Morrisson toujours aussi dangereusement talentueux, avec tout son venin de gosse riche pourri par les drogues et ses propres ambitions littéraires, mais à l'inverse Do It et Easy Ride nous montrent un groupe qui se laisse tranquillement aller... Que penser de The Runnin' Blue, rencontre improbable d'un groupe de drogués californiens et d'un western ringuard? Quant à The Soft Parade, les 9 minutes de la mini-suite poétique aux accents discoïdes sont aussi fascinantes qu'inquiétantes. Bien étrange album. Au moins, Morrisson Hotel, par son repli sur un blues-rock graveleux, a pavé la voie à l'ultime chef d'oeuvre du groupe, L.A. Hotel.



Bref... on aimerait voir Audio Fidelity et Hoffman s'attaquer à autre chose parfois... Déjà, la sortie début septembre du premier Prentenders fera du bien à un catalogue un peu trop fixé sur le classic rock, façon FM. Les années '78-'85  ne manquent pas de grands classiques oubliés: Television (Marquee Moon, quel album!), P.I.L., Iggy Pop, Buzzcocks, Wire, Joe Jackson.  Et si on doit à tout prix contenter les fanas de CHOM-FM, pourquoi ne pas s'attaquer à des albums historiquement mal servis par le CD: le premier Boston, Bat Out of Hell de Meat Loaf, voire même Styx!

Quant aux Doors, après les remasters audiophiles, les remix stéréo, les remix DVD-A stéréo, les remix multicanaux et le mono du 1er album, que reste-t-il à soutirer au catalogue? Ah oui, les mix et "edit" 45-tours. Ils y penseront sûrement. En attendant, après une bagarre de plusieurs années dont nous avons vécu les derniers soubresauts "live" sur le forum de Steve Hoffman, on peut annoncer que les bandes originales des Matrix Tapes ont finalement été acquis par le groupe et ses gérants; ceux qui ont acheté l'affreuse édition récente du spectacle "live" (Live at the Matrix '67) ne vont pas en revenir lorsqu'ils vont entendre la "vraie affaire". Dire qu'on les a roulés dans la farine, c'est peu dire. La différence entre les vrais Matrix Tapes et la version officielle est abyssale. On vous tient au courant.

 
Live At The Matrix

mercredi 26 août 2009

The Blood Of The Land [Dylan]

"Some people say I got the blood of the land in my voice"
"I Feel A Change Comin' On"

"Together Through Life", sorti en avril dernier, reprend exactement là où "Modern Times" a laissé, lui-même succédant à "Love & Theft" sans le renier. Jack Frost / Robert Zimmerman / Bob Dylan est dorénavant aussi éternel, immuable, qu'un paysage minéral, qu'une route abandonnée qui s'érode tranquillement. Une Route 66 musicale, traversée par les coyotes et les tatous et les herbes à serpent, avec un vautour ou deux qui se repaissent d'un chevreuil crevé sur le bord de la route, et ce Corbeau Noir qui croasse sur le bord de la route, regardant le spectacle avec la distance et la lucidité tranquille de celui qui vit ses derniers automnes. Étranger à l'écoulement du temps, à l'influence des modes, aux critiques, à ceux qui circulent tout près et qui restent à distance, étrangers, aliénés par ce morceau de civilisation qui tranquillement coule vers la déliquescence.

Troisième album depuis le début du millénaire, même formule, plombée cette fois par un son plus blues, la guitare de Mike Campbell des Heartbreakers et la présence remarquée de l'accordéon de David Hidalgo (Los Lobos) en filigrane.
Si vous voulez plonger dans les multiples références et citations littéraires qui traversent les textes de Zimmerman et Frost dans cet album, voici un lien vers une série de petites chroniques fascinantes...
Partie 1,
Partie 2,
Partie 3,
Partie 4,
Partie 5,
Partie 6,
Partie 7,
Partie 8,
Partie 9.

Remastering: le diable est dans les détails (Bill Nelson)


Bill Nelson
, guitariste de Be Bop Deluxe, peut-être mieux connu au lecteur de ces pages pour sa magnifique contribution aux plages instrumentales de Gone To Earth de David Sylvian, a écrit ce texte fascinant sur le remastering et ses dangers:

"It's a strange thing, this remastering malarky. I remember, a while back, some Beatles remastered material coming out...and yes, it was 'brighter,'clearer and there was more separation between the instruments, etc. But you know what? I didn't like it. It lost something that the originals had. I much preferred the way the original releases sounded.

Clarity and prescence can make recordings that originally gelled and hung together perfectly sound clinical and artificial. Sometimes, it's the actual LACK of digital clarity that gives recordings made by analogue methods their magic and warmth.

There's much more to the process of mixing music than just cleaness and clarity. Some of the most wonderful and iconic recordings have deliberately used murkiness and mystery to achieve their effect. Often, it's the subtle blend of instruments, the blurring of lines, the foginess, that creates the magic sound, not their separation. Anything that alters that relationship will destroy it.

I know that, when I used to record at Abbey Road with Be Bop Deluxe, we spent a great deal of time and care getting the recordings to sound the way we wanted them to sound. That same care was applied to the original mastering, to preserve the sound we had achieved in the recording and mixing process. Any remastering aimed at 'improving' the sound picture, or 'clarifying' it will change the delicate balance of tonalities and instrumentation to some degree or other, and in many cases, I think, to the detriment of the music and often to the artist's original intention.

Cleaning up an analogue recording via digital means can be a negative step, rather than a positive one. Plus, as we all know, the myth of remastering has long been used by the industry to sell albums over and over again to fans who already bought the thing first time 'round. Remastering and 'alternative takes' are both useful marketing devices for record companies.
Vous pouvez suivre la discussion sur son site Web.

mardi 25 août 2009

NEIL YOUNG, Mr Soul Man

      

Je connais peu le monde de Neil Young.

J'ai eu, comme tout le monde dans les années '70, un vinyle de Harvest, son grand classique de 1971, et me rappelle de presque chaque note, surtout l'émouvant The Needle and the Damage Done. Je regardais avec envie le vinyle triple de mon copain Ben, ça s'appelait Decade, et ça montrait que Neil Young savait déjà construire des rétrospectives intéressantes. Je savais qu'il était le sel rock du super-quatuor folk-rock californien Crosby, Stills, Nash & Young, une bande d'hallucinés qui torchaient des harmonies vocales célestes et qui, en rétrospective, formaient un pur diamant de talent comme peu de groupes en ont eu (et un immense gaspillage, dans la gueule de bois générale de l'après Woodstock).


Après son retour en gloire en 1979 avec Live Rust (Hey hey my my, Rock'n'roll could never die), j'eus la patience de suivre Young (un peu, parce que l'homme est très productif) dans ses multiples métamorphoses dans les années '80, le rockabilly (Everybody's Rockin'), le techno (Trans), le R&B (The Note's For You) puis j'ai un peu abandonné. Ce mec était azimuté, comme disent les Français, et le monde rock était en profonde mutation: de nouveaux héros occupaient ma platine (U2, Pixies, Talk Talk) et Young passait son temps à déjouer les attentes et à nous faire languir d'un nouveau Harvest. Il avait un peu de Zimmerman dans le nez, ce mec. Et les années '80 n'étaient pas tendres pour les héros de Woodstock et leurs amis.

Mais comme Dylan, comme Joni Mitchell, Neil Young est un authentique songwriter: un artiste, un écrivain, qui a choisi comme forme d'expression la chanson rock, et qui sait utiliser ce format si simple, si réducteur en apparences, pour y condenser des sédiments lourds de l'expérience humaine. Sa voix détimbrée, ce falsetto fragile, angélique pas d'ailes, est aussi dinstinctive dans le paysage sonore que la croassement de Corbeau noir de Bob Dylan, son seul rival par l'ampleur de l'oeuvre et la durabilité de la pertinence.

Et pendant que les aficionados célèbrent et se déchirent sur la sortie événementielle de la compilation mammouth du Neil Young Archives en Blue-Ray, un projet auto-biographique qui redéfinit par ses dimensions titanesques l'art de la compilation, j'ai fait un détour par quelques oeuvres des débuts du songwriter canadien, fin des années '60. Et je me demande combien de perles noires il me reste à découvrir tellement je suis ébahi par la singularité de l'oeuvre, par sa force dissimulée.


Buffalo Springfield

J'ai d'abord plongé dans le second Buffalo Springfield de 1967, Buffalo Springfield Again, qui joue en boucle depuis une semaine chez moi. Tout un terreau de talents: Stephen Stills, Neil Young et Richie Furay, ce dernier qui allait fonder Poco dans les années '70, les deux premiers qui allaient se retrouver au sein de CSN&Y avant de connaître des débuts de carrières solos éclatants.



J'écoute Again en boucle à cause du "opener". Tout comme Revolver des Beatles commence parfaitement avec Taxman, Buffalo Springfield Again a son parfait opener: un rock carré, baveux de Neil Young, parfait single de 1967, Mr Soul, regard cynique et halluciné sur la vie de rock star, que Neil Young aurait composé alors qu'il était en convalescence d'une attaque d'épilepsie subie pendant un spectacle... Riff tranchant à la Satisfaction, guitare solo fuzzé à l'envers inversée sur la bande: un condensé d'époque.

In a while will the smile on my face turn to plaster?
Stick around while the clown who is sick does the trick of disaster
For the race of my head and my face is moving much faster
Is it strange I should change? I don't know, why don't you ask her?
Malgré toutes ses qualités, Buffalo Springfield n'allait que passer: trois albums, de 1966 à 1968... Mais Neil Young ne faisait que commencer sa carrière.

Je viens de découvrir Neil Young, le premier album solo, sorti dans l'indifférence en janvier 1969, peu après son départ de Buffalo Springfield et avant qu'il rejoigne Crosby, Stills & Nash. Et j'écoute, fasciné, ce petit chef d'oeuvre, en mode mineur, de folk-rock aventureux, épique, comme un western flyé, petit budget et grandes idées, avec cette sorte de solidité dans la forme de Unforgiven de Clint Eastwood. Si cette description peut avoir le moindre sens.

C'est un peu exagéré; Unforgiven est un chef d'oeuvre, Neil Young un joli terreau bordélique. On est loin de l'équilibre parfait et des mélodies mémorables de Harvest. La voix de Young est mal assurée, et dans le mix original que j'écoute en ce moment même (et qui fut retiré du commerce peu après), elle est enterrée dans d'audacieux arrangements d'un collaborateur de Buffalo Springfield, Jack Nitzsche: surprenantes guitares fuzzées, cordes cinématographiques... Tout le futur de Neil Young semble se condenser dans un petit chef d'oeuvre de moins de 4 minutes: The Loner, le titre sur lequel je reviens toujours, parce qu'il est complètement addictif, par ce mélange de violence des guitares, de douceurs de cette voix à la fois faible et si expressive, et le parfum poussiéreux des cordes. Un 4-minutes autobiographique parfait, alternant mode majeur et mineur, comme un monde en miniature, après quoi tout a été dit.



The Loner est si fort comme titre qu'il fait de l'ombre au reste de l'album: mais I've Been Waiting For You et ses guitares plombées, le joli The Old Laughing Lady (malgré des choeurs gospel un peu overkill comme on dit) et l'épique The Last Trip To Tulsa, à la Dylan, vous feront tous passer de très beaux moments. C'est férocement anti-commercial, et c'est ce qui est beau: pas de suits à se demander si ça va jouer à la radio, pas de A&R qui ont le doigt sur le piton du compresseur au mastering... Parfums d'une époque malheureusement oubliée.

lundi 17 août 2009

Remaster Blues Breakers: ce sera le mixage MONO!

Il faut admettre que l'Internet, comme communauté d'intérêts, est parfois dure à battre.



Devant l'annonce de la sortie par Audio Fidelity, d'une version CD Gold de l'excellent Blues Breakers with Eric Clapton de John Mayall (1966), remasterée par Steve Hoffman, la question qui se posait était: quel mixage allait être utilisé? Le mono ou le stéréo? Lequel serait le plus désirable? J'ai donc posé la question aux aficionados de cet album remarquable, qui allait être à l'orgine des graffitis "Clapton is Gold" dans les rues de Londres dans les années '60.

Réponse presque unanime: le mono. Pourquoi?
  • le mix stéréo existe déjà en CD, dans une excellente qualité, dans le CD original de 1987 et dans une version audiophile de MFSL;
  • les seules possibilités d'obtenir les mixages mono sont dans le Deluxe Edition et un 2-fer mono/stéréo de 1998, les deux remasterés de manière détestable paraît-il (noise reduction et compression);
  • le mixage mono favorise la guitare de Clapton;
  • John Mayall préfère le mixage mono.
S'est entamé sur le site de Steve Hoffman une mini-campagne pour que le mixage mono soit le choix de Audio Fidelity... Malgré le scepticisme du grand ingénieur, 146 posts plus tard, les amateurs de blues-rock ont eu leur récompense sous la forme d'une courte missive du grand patron d'Audio Fidelity:

"We agree with you. It’s the Mono mix for the “Blues Breakers”. Hey, we want to hear Clapton’s guitar “soar” as well as you guys do, and who can possibly argue with John Mayall? If he wants the mono, that’s what we’ll do.

Thanks for sharing your thoughts with us.

Marshall"
Hey! On vit une époque formidable!

Espérons maintenant pour bientôt un remastering similaire pour l'album suivant de John Mayall et les Blues Breakers: The Hard Road, avec le grand Peter Green (compositeur de Black Magic Woman et fondateur de Fleetwood mac) remplaçant Clapton à la guitare.

lundi 3 août 2009

Sur la platine: le dernier Yves Desrosiers


Yves Desrosiers est de retour... Sorte de Romanichel des sons, celui qui a amené l'extraordinaire Vossotski dans la langue de Molière sort un second album de compos personnelles, les bien nommées Chansons indociles.

Il n'a pas la plus grande voix, mais son univers est particulier, très cinématographique, un peu comme un épisode de Carnivale. Si Star Académie c'est votre truc, vous allez haïr, ou ne rien comprendre. Mais si Marie-Jo Thério vous attire, que vous aimez Llhasa, bref que vous aimez les chansons singulières, avec des parfums de chemins poussiéreux, de paysages étranges, de climats lynchiens, plongez, plongez... Il reste encore au Québec, n'en déplaise aux comptables de l'industrie culturelle (véritable rangée de coquerelles), il reste encore disais-je d'irréductibles artistes qui créent des choses tout à fait uniques, singulières. Des Jorane, des Karkwa, des Patrick Watson. Et puis Desrosiers, c'est toujours cet excellent réalisateur qui n'est pas du tout étranger au succès de Llhasa: capable de créer un monde hypnotique, halluciné, à l'aide de quelques notes. Écoutez moi la beauté de la mise en sons de Ma ruelle; la cavalcade trépidante de Maria; l'ambiance foraine couleurs sépia sombre de Circus.

Et Robin Aubert (le cinéaste/acteur, qui signe la plupart des textes) crée des petites fictions qui lui ressemblent; images fortes, une façon un peu sèche de jeter les mots sur les notes, des textes colorés, un peu théâtraux, des fables peuplés d'êtres étranges. Ses textes nous sortent des giclées de bons sentiments de la pop d'aujourd'hui; la pornographie sentimentale du hit-parade.

Excellent produit d'Audiogram (un autre).

(par contre, euh oui, c'est quand même pas mal compressé au mastering)

dimanche 2 août 2009

Le mono selon Bruce Botnick


Bruce Botnick, ingénieur de son des Doors, dans une entrevue avec Michael Fremer:

I still like mono to this day, because there aren't any distractions. It's like a black and white movie, where you can create incredible dimensions, depth-wise, and hide things. That's very hard to do in stereo. That's because we don't record in stereo: We record multi-track point-source discrete audio. The difference in the mix was when we would open it up to stereo, we would have to change things, because it didn't fall in the same place. Spatially, things would fall into other places.