dimanche 28 décembre 2008

Mitch Mitchell, pas assez bon pour Wings??? Allons donc...


Cet après-midi, je regardais, machoîre pendante, l'édition Criterion de "Jimi Plays Monterey", un docu-captation réalisé par D.A. Pennebaker, le même qui a réalisé le fascinant documentaire Don't Look Back sur Bob Dylan... (évidemment, je ne résiste jamais à l'envie de glisser le nom de Bob Zimmerman partout sur ce blogue)

Ça se passait en juin 67 et ce fut une date marquante, non seulement de la carrière de Jimmy James mais aussi de l'histoire du rock. Le Monterey Pop Festival (organisé entre autres par John Phillips, le Papa des Mamas and Papas, California Dreamin', vous vous rappelez?) a révélé au public américain non seulement le Jimi Hendrix Experience, mais aussi Janis Joplin et les Who.

Dans le cas de Jimi, c'était un concert important: notre métis (il aurait du sang cherokee) virtuose qui fut guitare rythmique pour Little Richard entre autres, avait dû s'exiler en Angleterre pour permettre à son art de se développer; c'est là qu'il recrute Noel Redding (un autre guitariste rythmique qui dut migrer vers la basse pour parfaire le trio) et surtout Mitch Mitchell, un batteur à la fois puissant et subtil, et qui était le moteur parfait pour la rutilante carosserie Hendrix... Le concert de Monterey, c'est le retour en terre d'Amérique, et Jimi était drôlement pompé avant de monter sur scène...

Décidé d'en mettre plein la vue à ses compatriotes, Jimi a tout fait pour passer avant les Who... car il avait déjà décidé de sacrifier sa guitare pour célébrer son retour américain... et Pete Townshend avait le même plan: détruire sa guitare dans un océan de feed-backs rageurs... Ils durent tirer au sort, et les Who ont gagné...

Mais 40 ans plus tard, tout cela semble peu de choses... La performance d'Hendrix est passée à l'histoire, et l'image de notre halluciné de la six-cordes accroupi comme un amant sur sa guitare en feu est demeurée l'image emblématique du festival...

Logorrhée de mots... déclenché par une anecdote un peu triste que je viens de lire. Mitch Mitchell, le batteur magnifique qui propulse Jimi dans chaque solo à Monterey, ne s'est jamais remis de la mort de son leader... et je lisais l'anecdote selon laquelle, cherchant désespérément une gig, il avait auditionné pour Paul McCartney et les Wings au début des années '70... Dur de croire qu'il n'a pas été retenu. Probable que Paul anticipait une batterie trop présente et mal accordée aux ambitions de pop star qu'il nourrissait.

Trop bon pour les années '70 et le format pop corporate, Mitch Mitchell était né pour jouer au sein d'un power trio. Et aucun d'eux n'égala jamais Jimi Hendrix Experience.

vendredi 26 décembre 2008

Magnifique tricot de Noël


Noël peut vraiment être un chemin de croix musical; elle est partout la musique, avec les petits grelots, les arrangements cheap, le travestissement de la moindre ritournelle hivernale et la tornade de beaux sentiments dégoulinants comme une meringue.

Aussi, quand on trouve un beau disque de Noël, un vrai, on est soulagé, on le range en lieu sûr, juste à côté du Charlie Brown Christmas du Vince Guaraldi Trio et de Happy X-Mas de Lennon...

À ma très grande surprise, ma douce a ramené à la maison le mini disque de Noël du plus ludique des ensembles québécois de l'heure. Elle a craqué après l'avoir entendu à la radio. Nous n'avions pas vraiment d'atomes crochus pour l'approche CPE Passe-Partout de Tricot Machine aussi je craignais le pire, mais j'ai ravalé mes préjugés assez vite.

C'est beau dans ses mots, c'est d'une belle richesse orchestrale, ça m'a même rappelé par moments Illinoise de Sufjan Stevens, qui, j'en suis sûr, fait partie du playlist maison du sympathique duo et de leur producteur.

Un très beau 19 minutes que je vous recommande.


dimanche 14 décembre 2008

Systèmes neutres ou systèmes colorés?

Test à l'aveugle, objectivité, aller plus loin, trouver le Saint Graal sonore.
Je suppose qu'on cherche le système le plus neutre possible.
Pourtant, il y a entre la musique et nous toute une chaîne humaine et technique et cette chaîne est tout sauf objective.

On veut entendre le disque tel que l'artiste voulait nous le donner?
Problème...


The artist/producer's intent was determined on the playback system they used to listen to the recording. If you want *that* sound you would have to use their system and room. No guarantee that greater neutrality gets you closer to the artist's intent with any given recording. (Scott Wheeler)


Absolute neutrality in playback sounds good in THEORY but will really get you nothing unless you plan to play back only stuff that you have personally recorded and mixed on the system or something. Find gear that sounds good to you on as many recordings down through the years that you can find. Or else, you will be one of those people who have 2,500 records and only 5 sound good on the system. You keep playing those 5 to show off the sound, etc. and the rest gather dust. The most common mistake that newbie Audiophiles make (myself included). They read charts, specs, etc. and want razor flat response in all gear and this and that and don't LISTEN. It's the colorations in gear (and in recorded music) that make it involving and lifelike sounding. Don't get trapped into that neutral scene, it will make you unhappy. (Steve Hoffman)

mercredi 10 décembre 2008

Sur la platine: Jon Hassell

Musique des possibles? Ethno-beat d'un territoire imaginaire? Enregistrements à la fois primitifs et futuristes d'un peuple mythique? Comment décrire une musique absolument unique? C'est compliqué. Peindre des sons avec des mots. Fatalement, il faut y aller par analogie.



De tous les disques nés de la mouvance "ambiant" dont Brian Eno est bien sûr le fer de lance, aucun disque ne me transporte autant que ce disque étrange à la pochette rose, crédité à Jon Hassell et Brian Eno: Fourth World Vol. 1: Possible Musics. Dans l'écrin d'une mise en sons qu'on associe peut-être à tort aux manipulations électroniques de Eno plane un étrange instrument manipulé par un être à l'imagination fertile mais singulière: Jon Hassell, trompettiste, aux commandes d'un instrument dont le son est extrêmement difficile à décrire, mais inoubliable après quelques mesures: une trompette électronique, détimbrée, à l'éclat flou, aux mélopées circulaires, qui évoque à la fois l'eau d'une chute et la brume d'un crépuscule, ou alors le chant nocturne d'un oiseau inquiétant, à peine physique.

Plus prosaïquement, un interviewer plus allumé que moi (Jason Gross, Perfect Sound Forever) a mis le doigt dessus, en demandant à Jon Hassell si son style de jeu à la trompette n'était pas en fait très proche du chant indien. Réponse de l'Américain:

Just about everything I have, I owe to Pran Nath. For the first few months with him, I learned by singing. A phrase would be sung to you, you'd sing it back and if it was correct, you'd move on to something more complex. If not, you work on it again or do something simpler. It was aural/oral transmission.

Then I started to try to do that on trumpet. I had to completely forget everything that I'd ever been taught I'm still trying to forget it. It was a matter of trying to make the mouthpiece sound like a voice merged with a conch shell.

Charm, une longue mélopée de 21 minutes qui clôt l'album, demeure un de ces morceaux singuliers qui vous hantent, comme une image troublante dans un film peut vous hanter, vous habiter faire partie de votre imaginaire. Batteur africain, percus brésiliennes (Vasconcelos si ma mémoire est bonne) et la voix hantée de la trompette de Hassell qui passe comme un spectre... pas étonnnat qu'après l'avoir entendu, Brian Eno, qui, à l'époque, éclatait dans toutes les directions en compagnie des Talking Heads, ait voulu associer son nom à une si séduisante proposition, si proche de ses propres recherches: musique ambiante, rythmes ehtniques, recherche sonore... Une amitié était née, une collaboration artistique, mais des egos allaient souffrir...

Brian and I went into the studio to do Possible Musics. At that time, Brian was known to me as a guy who did big washes, big watercolor sweeps. I imagined that he would be filling in that tambura part that I was talking about before.

This record could have easily been 'by Jon Hassell, produced by Brian Eno.' That would have been correct billing. But at the time, I was trying to pay the rent and I decided that I wanted it to say 'Jon Hassell/Brian Eno.' This later became a problem for me because he had such a high profile in the pop musical world, it often became 'his record', so to speak. That was painful.

The next thing was Bush of Ghosts, which came to me as a project that we all (Brian, David and I) were going to do together. We were starting from the premise of what the Residents had done with Eskimo, that idea of fake ethnic music. They were going to go out to the desert somewhere in California, get an 8-track and send for me. At the time, I was a 'downtown Soho composer' struggling to make the rent every month so I couldn't even get the plane fare to fly there. I got a tape back a month or so later and it was some North African vocal over a bass and drum loop.

I was outraged. This was clearly a not-too-subtle appropriation of what I was doing over rock drum and bass I thought it was a very unethical thing to do and the fact that I was never credited--even for being an inspiration--is a testament to the testosterone in the room at that time. Psychologically I imagine it went something like, 'We're rich and famous...we can get away with it, so we'll do it.' Maybe there was a self-hypnosis that permitted them to ignore the origin of the whole situation. That created a rift for awhile. This made the struggle for my own musical identity in the marketplace all that more difficult and I still run into the consequences of this arrogance.
[L'album en question, qui a si choqué Hassell, est évidemment le fameux My Life In The Bush Of Ghosts.]


Peut-être son ego meurtri (il se crédite aussi d'avoir entrainé Peter Gabriel sur la voie des rythmes africains; je le créditerais plutôt d'avoir précédé Gabriel, Eno, Byrne et les autres sur un chemin qu'ils empruntaient déjà) explique-t-il que la série des Fourth World disparut après un second album (Dream Theory in Malaya) que je n'ai jamais eu le plaisir d'entendre. Mais pourtant, un 3e tome existe presque. Il s'agit de Power Spot, une co-production du fameux duo Brian Eno/Daniel Lanois, avec entre autres Michael Brook à la guitare. Un disque ECM de 1986, qui semble le sequel de Possible Musics, tant les textures sonores et le jeu sinueux du musicien sont en continuité avec son fameux prédécesseur.



Hassell a aussi prêté sa trompette à un nombre considérable de disques, dont Brilliant Trees (le 1er et excellent disque solo de David Sylvian) et la bande sonore de The Last Temptation of Christ de Peter Gabriel. On ne s'étonne pas de savoir que dans ses années de formation (entre autres avec Stockhausen!), Hassell aura cotoyé d'autres figures marquantes des musiques contemporaines: le bassiste de Can, Holger Czukay (qui a lui-même cheminé sur les sentiers ethniques et les collages inusités, tant avec son groupe que dans ses albums solos), Terry Riley, etc.

Voici quelques mots tirés de l'excellente entrevue mentionnée plus haut, quelques mots par lesquels Hassell décrit avec poésie son Quatrième Monde...

I wanted the mental and geographical landscapes to be more indeterminate- not Indonesia, not Africa, not this or that. I thought I was more successful in trying to create something that COULD HAVE existed if things were in an imaginary culture, growing up in an imaginary place with this imaginary music. [...] 'If something really feels good, then why don't you do it all the time instead of only doing it on Saturdays?' Fourth World is an entire week of Saturdays. It's about heart and head as the same thing. It's about being transported to some place which is made up of both real and virtual geography. It's about a beautiful girl and a beautiful situation at the same time.

samedi 29 novembre 2008


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jeudi 27 novembre 2008

66 ans aujourd'hui... si...

Si...
Jimi Hendrix aurait eu 66 ans aujourd'hui.
RIP

vendredi 21 novembre 2008

Apres le Jimi Hendreix Experience, il y eut le Band of Gypsies

... et un témoignage sonore DÉVASTATEUR de leur première répétition.
C'est sur le coffret mauve The Jimi Hendrix Experience
Disque 3, plage 4. Room Full Of Mirrors.
Dès les premières secondes, le jeu funky du batteur Buddy Miles, en remplacement de l'imaginatif et jazzy Mitch Mitchell, propulse Hendrix dans un nouveau monde sonore, dans laquelle sa guitare brille plus que jamais.

Il faut absolument que je me tape le live Band of Gypsies, seul live autorisé par Jimi de son vivant, témoignage de ce "band" qui ne devait pas vivre assez longtemps.

Quel performer!

jeudi 20 novembre 2008

La voix de Dylan

Bob Dylan et son croâssement poétique, voté 7e meilleur voix du monde du rock par un panel de spécialistes réunis par le Rolling Stone Magazine?

Je ne l'aurais jamais cru.

Et pourtant, quel interprète. Écouter Tell Tale Signs, la 8e édition des Bootleg Series, c'est juste réaliser que la justesse de la voix ou le velouté du timbre, on s'en tape parfois. Zimmerman est un grand poète du rock et un interprète habité.

Bono a dit: “Dylan did with singing what Brando did with acting. He busted through the artifice to get to the art.”

Ouais. On peut pas mieux dire.

mardi 18 novembre 2008

Jimi Hendrix: guitar-hero? Bien plus...


Je ne suis pas tellement "guitar hero" dans la vie. Pour moi, le summum sonique de la six-cordes se trouve dans le solo de Steve Hackett sur "Firth of Fifth" (Genesis, "Selling England by the Pound"), mon moment musical anthologique par excellence. Envol mélodique, choix des tonalités, un artiste qui met tout ce que peut s'exprimer par la six-cordes. La vitesse et la technique? Who cares? Pas moi.

Aussi ais-mis beaucoup de temps à m'asseoir et à écouter Jimi Hendrix, le guitar-hero fauché prématurément et stupidement par un mauvais mélange pilules-alcool, après tout juste trois ans d'une éclosion artistique incandescente. Jimi était, pour moi, un des trois grands "J" fauchés dans la fleur de l'âge par les drogues en 1970 (avec Jim Morrisson et Janis Joplin, bien sûr). Je le rangeais dans une longue suite de virtuoses dont les prouesses pyrotechniques allaient m'ébahir et m'ennuyer. Quelle ignorance!

Alors que Jimi Hendrix peut, en quatre minutes bien tassées, vous assommer et vous élever en même temps, non seulement par sa technique époustouflante à la guitare et par l'imagination délurée qu'il met dans ses effets stéréo (psychédélisme, quand tu nous tiens), mais aussi par son lyrisme mélodique, comme dans le magnifique Little Wing (où il ne cède en rien à David Gilmour), l'arc-en-ciel de tonalités qui se succèdent, souvent à l'intérieur d'une seule pièce, toujours dictés par un feeling incroyablement sûr (écoutez-moi Bold As Love, qui peut même s'en approcher à ce niveau?), par les puissantes racines blues qui assoient son style (Voodoo Chile. Jimmy Page fait une révérence), par le groove puissant qui le propulse (Voodoo Child - Slight Return)... et une fois qu'on s'est remis de l'expressivité de sa guitare, on entend quel joyau est derrière: des mélodies débordantes d'un généreux soul, une voix magnifique, qui a gardé le grain black mais sans l'aspirité rauque des Otis Redding et James Brown ou même Prince; et que dire de l'imagination débordante de ses arrangements, bien servis entre autres par ce batteur cool et musclé à la fois qu'était Mitch Mitchell.

Oubliez les compilations, toujours décevantes parce qu'impossible à réaliser au niveau du pacing et à unifier au niveau du mastering (qualité d'enregistrement beaucoup trop variable). De toute façon, à peine trois albums en quatre éditions constituent le coeur du patrimoine artistique de Jimi Hendrix. Et c'est un patrimoine indispensable à quiconque aime le rock.

D'abord, l'incroyable floraison de 1967: après un 1er 45-tours canon en décembre 1966 (Hey Joe, trois mois seulement après la formation du Jimi Hendrix Experience!) et un 2e encore tout aussi hallucinant (Purple Haze, mars 1967), sortaient le très beau single The Wind Cries Mary et la version britannique de Are You Experienced (le 12 mai 1967), album qui ne comprenait aucun des singles, conformément aux usages de l'époque. Seul Sgt Pepper's empêcha le disque d'atteindre la 1ère place des palmarès de l'époque.



Puis, après le show marquant de Monterey, la compagnie Reprise prépare une sortie nord-américaine de Are You Experienced, avec plusieurs changements: remixages stéréo, nouvelle pochette, inclusion des singles déjà sortis et choix du "pacing" par Jimi, qu'on force cependant à abandonner le blues Red House (on lui dit, incroyablement, que le blues n'est pas apprécié en Amérique du Nord!). En tout, les deux éditions comprennent 17 pièces et 60 minutes de musique, mais ce n'était pas fini.




Dès décembre (nous sommes toujours en 1967!), nouvel album du Jimi Hendrix Experience, le magnifique Axis: Bold As Love. Lequel va encore plus loin dans le délire psychédélique, le raffinement sonore et la cohésion de groupe. Il offre à mon avis les deux titres les plus immortels de Hendrix: Little Wing et Bold As Love.




On est loin de s'en douter, mais le 16 octobre 1968 paraîtra le dernier album studio complété par Jimi dans sa vie. C'est un double, il s'appelle Electric Ladyland, et il trône au panthéon des grands albums-double de l'histoire, avec The Beatles (album blanc), paru la même année et Blonde on Blonde de Dylan. Augmenté par plusieurs musiciens, dont Al Kooper et Steve Winwood, le Jimi Hendrix Experience approche la désintégration en tant que groupe. Un album riche, bordélique, dominé par le formidable jam bluesy Voodoo Child, l'épique 1983...(A Merman I Should Turn To Be), la magnifique reprise du All Along The Watchtower de Dylan et l'incroyablement groovy Voodoo Chile (Slight Return).



Maintenant, le catalogue de Hendrix est un bordel total de rééditions, de remasterings (bons et mauvais), repackaging, out-takes, inédits et bootlegs officiels et non-officiels sur lesquels nous pourrons revenir...

Mais si, après avoir digéré la matière des trois albums principaux, vous voulez vous payer la "traite" en matière de prises alternatives et d'inédits, et vous perdre dans l'incroyable foissonnement Hendrix, il vous faut le coffret quadruple The Jimi Hendrix Experience (2000). J'ai à peine effleuré la surface, mais je me repasse déjà en boucle les versions instrumentales inédites de Little Wing et Bold As Love, où la guitare de Jimi est poignante d'expression. c'est un exemple de ce qui peut être fait à partir du catalogue inédit d'un artiste. Et le son est excellent.



Masterings de référence:
Are You Experienced (UK): Polydor West German, No. 825 416-2
Are You Experienced (USA): Reprise original (sans RE-1 dans la matrice) 6261-2
Axis: Bold As Love: Reprise 6281-2
Electric Ladyland: Polydor West Germany 823359-2, le "Naked Ladies Cover", avec le "cover art" non approuvé par Hendrix et avec un mauvais pacing (les faces défilant ainsi: face 1, face 4, face 2, face 3), mais avec un excellent son.

lundi 17 novembre 2008

Morley - une voix et de la poésie

Allez, laissons-nous aller.
Soulful, poétique, simplement un beau moment à passer...
Un autre pied de nez au cynisme.



Extrait de l'excellent blogue JazzWax...

"What I realized after studying voice is that poets sing. Images So I combined the two things I knew best. For example, Sade is a great poet. Prince, too. That’s how I grew up. Listening to those guys. And Nina Simone. It’s all survival music. Truth telling. When you feel the truth resonating inside of you, you've survived. Seen is a real document of a time I was going through.

jeudi 13 novembre 2008

Jimi Hendrix Experience réunis

... mais malheureusement en un lieu innaccessible.
Mitch Mitchell est parti rejoindre ses deux acolytes...

















Récemment, écoutant Are You Experienced?, le premier disque du trio, j'ai décollé mon attention de Jimi pour de longs moments. Pourquoi? Parce que je découvrais le groove insensé du batteur. Écoutez "Manic Depression". Wow!

Mitchell est mort de causes naturelles, à 61 ans, en pleine tournée du Experience Hendrix show.

At 5-foot-5, the wild-haired Mitchell was a small guy who played "lead drums," combining meat-and-potatoes beats with rapid-fire jazz in the three-person group.













Sur sa page MySpace, on peut lire:

Mitch plays in the Elvin Jones explosive style with fast snare and cymbal riding coupled with more basic rock triplet bass patterns and big bombs. In line with jazz drumming he played within the snare/hi-hat/ride cymbal/bass drum arc with the toms as variations. His hi-hat and cymbal work is of the highest order and he used brushes on occasions. He is criticised as a busy drummer which is grossly overstating the case. More restrained drumming may have been more appropriate on a few tracks (that’s Mitch’s opinion). I really can’t describe them as flawed, just that it could have been done differently and that doesn’t mean better! The thing that Mitch had was incredible stamina especially in the studio as Hendrix endlessly worked though songs. He always responded to Hendrix’s variations and worked from his arrangement. Mitch never defined his arrangement within the song. Live was the same, as it was need to follow Hendrix’s improvisations and also fill in those gaps, especially when Hendrix did his stage act. It was behind these that Mitch took his solo over a droning bass line, usually at an exciting high tempo. He was a fast drummer - lightning at times and surprisingly loud for his diminutive stature.

jeudi 23 octobre 2008

Analogue vs digital

Réponse de Barry Diament à un partisan du digital qui essaie de le mettre en boîte depuis toujours...




Citation:
Numeric representations have a place for sure. It is important to remember however, that they are abstract constructs and as such, will necessarily miss some of the reality. If this is not recognized from the start and kept in mind throughout, it is easy to get fooled into confusing the map and the territory (to borrow from Korzybski).

It would be like analyzing MRIs and CAT scans and pulse rates and pupil dialation and confusing the results with the experience of making love. ("Was it good for you dear?" "Hold on, let me check my EEG and I'll let you know.")

Best regards,
Barry
www.soundkeeperrecordings.com
www.barrydiamentaudio.com


Pas mal non?


vendredi 17 octobre 2008

Soirée d'écoute

Sur la platine hier...

Deux ensembles similaires hier soir (tous deux sur ECM), mais deux musiques fort différentes.
Deux duos trompette/guitare électrique, appuyés par des sections rythmiques basse-batterie.

D'abord, le guitariste "frippien" David Torn et le trompettiste Mark Isham, appuyés par la section rythmique de King Crimson circa 1980, Tony Levin et Bill Bruford. Ce disque échappe à l'esthétique ECM, tant dans sa pochette que dans son "son" (d'ailleurs, l'enregistrement n'est pas de Jan Erik Kongshaug, l'ingénieur de ECM, qui n'a fait que le mixage): la musique est dense, l'esthétisme incorpore des touches d'ambiant et de world beat à des échanges virtuoses des deux instruments solo. Ce n'est jamais inintéressant, mais c'est un peu trop jazz fusion à mon goût, dans le sens de compos qui manquent de centre de gravité; trop de solos, manque d'ambiance. Je ne suis pas un fan de Bill Bruford sur des percus électroniques, ça manque de ventre. Bon, c'est des virtuoses. et vers la fin, il y a un double-titre (The Network of Sparks) où les dosages semblent enfin "prendre": le beat, l'ambiant et les solos nous font finalement voyager sans discontinuité. Faudra que j'y retourne, peut-être que c'est plus intello que ce que je suis capable d'assimiler à froid. Un mot sur le son: on réalise toute la qualité des ECM de Kongshaug en entendant un disque qu'il n'a pas endisquer: le son est touffu, presque confus, et la prise de son manque d'air. Il manque la physicalité et le sens de l'espace qu'on en est venu à associer à ECM avec les années.

Après, sans m'en rendre compte, j'ai repris la même formation: trompette, guitare électrique et section rythmique sans piano. Mais nous sommes ici en présence d'un quatuor parfaitement intégré et à l'esthétisme très fort: le coeur rythmique de Arild Anderson (le contrebassiste des premiers ECM) et Patrick Héral donne à ces compos abstraites le centre de gravité qui semble tant manquer au Torn. Anderson a un son magnifique et une inventivité mélodique qui ne se dément jamais. Markus Stockhausen, leader du quatuor et trompettiste, injecte des solos qui sont comme de brusques éclats de lumière blanche. Plus en retrait, le vieux Terje Rypdal, à la guitare électrique, est le complément parfait du trio: quand il ne donne pas une couche d'ambiant music, il se lance dans des solos tranchants et énergiques. Surtout, ces 4 musiciens, évoluant sans mélodie , semblent en parfaite synchronicité. C'est abstrait, mais c'est beau, beau, beau. Plannant par moments, très énergique par d'autres, c'est 60+ minutes d'un trip dans un paysage scandinave très ECM, mais avec des dosages parfaits. Et l'enregistrement de Kongshaug : wow! J'adore! Ce Karta est un bien beau trip! Et aux deux bookends du disque, deux magnifiques compos ambiant de Andersen, Sezopon et Lighthouse. Tout est bon, y'a rien à jeter.


Pour finir, j'ai mis Here Comes The Flood de Peter Gabriel, version Robert Fripp (album Exposure): la voix de Gabriel sur fond de Frippertronics, ça me semblait une belle fin. Belle compo, belle interprétation. Mais après la magie sonore de Karta, bon sang, on aurait dit le son d'un vieux phonographe!


samedi 11 octobre 2008

Le chef d'orchestre: le CERVEAU derrière l'exécution

Excellent post sur le forum de Steve Hoffman. La question étant:
jusqu'à quel point le chef d'orchestre marque une interprétation de son empreinte. Voici une réponse éclairante:

In classical music, everything is a matter of interpretation.
From the dynamics to the tempo to the orchestral balance everything needs interpretation. For instance, let's take a hypothetical piece where the tempo is marked as allegro meaning "quick" or "cheerful".
How do we understand quick? It is quick enough for you and me?
Then the same piece is marked piano meaning softly. But again, what is the definition of soft?
So the conductor will offer his own PERSONAL interpretation on the above but not only those.
His performance needs to reflect the spirit and the intentions of the composer, something that takes years of studying but also a great level of intuition.
In a nutshell, the conductor is everything.
The orchestra of course needs to be able to materialize the conductor's vision, but without him, the orchestra is a body without a head or a brain.
http://www.stevehoffman.tv/forums/showpost.php?p=3856042&postcount=16

mardi 19 août 2008

Dynamique et musique: le rock, champion du low-fi

Vous aimez la musique dynamique?

Je ne parle pas de musique bruyante. Je parle de musique dynamique!

Comme dans: contraste entre les sons les plus forts et les plus faibles. Attaque soudaine. Accalmies subtiles.

Les contrastes sonores font partie de la vie. C'est une arme redoutable entre les mains des musiciens pour sculpter leurs paysages auditifs.

Et c'est une qualité en voie de disparition.

Au moment où les systèmes sonores deviennent chaque jour plus performants, plus dynamiques et rapides, où les enceintes deviennent plus efficaces et, conséquemment, plus aptes à réagir rapidement à un contraste de décibels, voilà qu'une nouvelle génération d'ingénieurs de son et au mastering biffent la dynamique, l'annihilent, mettent en place des peak limiters et des compresseurs et ramènent la plage dynamique à un minuscule 10 dB... ce qui permet à ceux qui écoutent la musique dans leur voiture et leur i-pod de percevoir, au-delà du bruit de fond, les détails les plus subtils du mixage, mais ça aux dépens de la plage dynamique, et donc, de la réalité du son.

Mais cette descente vers le lo-fi (basse-fidélité du son) n'est pas uniforme. La musique classique y échappe, le jazz aussi. Et quand aux vieux succès rock et pop qui remontent à une quarantaine d'années, tout dépend qui en signe le remastering.

Pour vous en convaincre, regardez le tableau qui suit! D'abord le classique.

La superbe prise de son d'ECM de Keith Jarett et Gidon Kremer interprétant Arvo Pärt est d'un réalisme saisissant et réalise des pointes de plus de 60 dB de dynamique sur une attaque fortissimo du violon et du piano, avant la 6e minute. Avec une dynamique moyenne de 30 dB, cette prise de son est "head and shoulders" au-dessus des autres!

Mais avec des dynamiques au-dessus de 20 dB, on voit que la culture musicale classique favorise la restitution des volumes sonores.

Qu'en est-il des jazz, blues et musiques du monde acoustiques?

Ce que je trouve formidablement révélateur, c'est de voir que des enregistrements mono de 1956 (Fitzgerald, en big band, et Rollins en quatuor) ont une plage dynamique tout à fait comparable à des enregistrements récents et que même le disque-phare du jazz west coast (Kind of Blue), smooth et velouté, offre une dynamique de plus de 20 dB. Et dans le cas de Rollins et Davis, on ne parle même pas des masterings de référence!

Et voilà qu'on arrive au chapitre triste de l'histoire; chapitre chronologiquement de plus en plus triste...

J'ai placé ces albums par ordre décroissant de dynamisme. Or, de manière aberrante, ça m'a donné aussi des albums placés par ordre chronologique. C'est à dire qu'à mesure que la technologie s'améliore, le produit présenté est de moins en moins de qualité!

On fait une exception avec David Sylvian, dont les albums sont des sculptures sonores magnifiques et qui, évidemment, ne se prive pas de dynamisme (à noter que ses enregistrements sont digitaux, pas analogues, ce qui prouve que ça n'a rien à voir!). Par la suite, les albums les plus dynamiques sont de vieux enregistrements de 68 et 69 (remasterées par des mains expertes cependant) avant la descente aux enfers dans le rock contemporain et ses ridicules 10 dB de dynamique. Plus nous avançons dans le temps, moins la plage dynamique est étendue, et même un album résolument lo-fi comme le formidable Funeral de Arcade Fire d'il y a 3 ans utilise plus de plage dynamique que le tout récent In Rainbows de Radiohead (sur une pièce tout en montée dramatique avec climax en plus!).

Maintenant, que Portishead compresse ses pièces, on pourrait croire que c'est un choix esthétique conscient et même participant de l'impact. Mais quand un album de art-rock complexe et riche comme celui de Radiohead est moins dynamique que du Arcade Fire, c'estquelque chose de carrément aberrant. Je me demande comment Robert Ludwig, l'ingénieur au mastering et dont la signature était recherché dans les vinyles il y a 30 ans, considère son propre travail!

Le divorce entre haute-fidélité et rock est-il irréversible???

dimanche 10 août 2008

Heaven just got a little funkier


RIP
ISAAC HAYES
1942-2008

aux dernières nouvelles,
Barry White aurait été aperçu dans un coin de Paradis avec son copain Isaac
ils jammaient ensemble sur le groove de Last Time I Went to Phoenix
Otis Redding les a rejoints en compagnie d'une section de cuivres
Ike Turner hochait la tête dans un coin
Max Roach et Art Blakey caressaient les peaux de leurs tambours

Heaven Just Got A Little Funkier...

dimanche 20 juillet 2008

McCartney et sa renaissance artistique

Oublions le ridicule discours nationaleux qui a entouré la venue de Paul McCartney à Québec, pour le 400e. La honte, ces sommités culturelles barbues qui répriment leurs bâillements devant les danses folkloriques et les ceintures fléchées, et qui considèrent la pop music anglaise comme un plaisir coupable! Comment se sentir froissé lorsqu'on a enfin la chance de voir en chair et en os un des icônes culturels de la contre-culture des années '60, enfin à Québec. McCartney n'a à peu près jamais fait de politique; c'est un artiste, et son legs se constitue d'un songbook qui nous aide à traverser la vie, joies et peines confondues, avec l'impression que l'humanité va finir par transcender ses limites étroites. Laisser Hey Jude au monde, c'est déjà immense! Récemment, McCartney a pondu un disque remarquable, sous l'aiguillon de Nigel Godrich, un producteur à qui on doit déjà pas mal de grandes galettes. Je vous le conseille fortement...

"Challengé" par le producteur Nigel Godrich (Radiohead, "Sea Change" de Beck), McCartney a épuré son jeu de son sentimentalisme dégoulinant et de ses ambitions au Top 40, avec pour résultat 13 titres qui respirent l'invention mélodique (un art dont il est un des derniers grands artisans). Un McCartney introspectif, dont la voix, intacte, a gardé une grande richesse émotive (écoutez "How Kind Of You"). Un McCartney renouvelé, qui , comme au temps des Beatles, sait intégrer des sonorités surprenantes (le "duduk" de "Jenny Wren") à des titres si instantanément mémorables qu'ils semblent avoir habité notre inconscient collectif depuis toujours. La contribution de Godrich n'est pas que dans sa main de fer qui nous a vraisemblablement évité les titres de remplissage dont McCartney est friand; écouter le remarquable "Vanity Fair" (qui semble évoquer en termes amers sa rupture avec Lennon), c'est réentendre les émouvants glissandos de "Sea Change" de Beck; et il y a un peu de Radiohead, période "Amnesiac" dans les sonorités de "Friends To Go". Résultat: le plus remarquable ajout au "songwriting book" déjà hallucinant de McCartney depuis des temps immémoriaux. Sans rejoindre les sommets de sa dernière période Beatles ("Let It Be", "Hey Jude"), plusieurs de ces titres n'auraient pas dépareillé sur "Revolver" ("Friends To Go"), le "White Album" ("Jenny Wren", "Follow Me") ou en b-side de "Lady Madonna" ("promise To You Girl"). Un disque qui va rendre jaloux tous les Neil Finn et David Gray de la terre.

jeudi 22 mai 2008

La TROISIÈME salve de PORTISHEAD


Je ne peux même pas évoquer proprement tout le bien que je pense du troisième opus, si longtemps attendu, de Portishead, le porte-étendard involontaire du mouvement trip-hop, et dont la musique est plus forte, fraîche, essentielle et actuelle que jamais, en 2008.

Je n'hésite même pas à dire que Portishead a frappé plus fort que Radiohead et son In Rainbows, et vu l'amour immodéré que je porte à la formation de Yorke, Greenwood et Co., ça évoque assez bien mon état délirant.

Les salves rythmiques sauvages et la talking radio de provenance et de langue inconnus qui ouvrent l'album sur Silence, la première pièce, nous plongent dans un voyage dense de rythmiques agressives, dominant les soundscapes élaborés et cinématographiques de Barrow; on a l'impression, récurrente, d'être dans un film de science-fiction glacial des années '80, tendance Blade Runner (succédant à l'ambiance film noir du second disque éponyme), comme si Philip K. Dick avait déménagé ses pénates dans une Angleterre post-industrielle et s'était mis à la musique pluvieuse; et pluvieuse est la voix si expressionniste, intime, déchirée, déchirante de Beth Gibbons, la voix d'un ange cerné par les climats sonores étranges de ses acolytes.

Le folk hanté de "Hunter", la beauté éthérée de "The Rip" et son solo de claviers à la Tangerine Dream, le climat de fin du monde de "Plastic" et ses roulements de batterie hyper-compressés, et ces bruits de pales d'hélicoptère (ou je ne sais trop quoi) à l'avant-plan du paysage sonore... Toutes les idées sonores de ce disques me plongent dans un ravissement pervers, comme un roman de Antonin Artaud. Et que dire de la salve sauvage de Machine Gun, un "grower", une rencontre entre Kraftwerk et l'électronique industriel, avec toujours cet ange aux ailes percées de trous de balle grosses comme le poing, Beth Gibbons, une interprète sans égal, que ce soit au sein de Portishead ou de son duo avec Rustin' man.

Vraiment, ce disque est une décharge sonore, le moment sonore inouï de ce début d'année. Drôle de disque de printemps cependant, comme vous l'aurez deviné.

Ben quoi, restez pas planté là! Courez l'acheter!

Sur la platine: John Zorn en plein survoltage


Ce n'est pas un disque qui peut servir de trame de fond.
C'est au contraire un disque sur laquelle on branche un cerveau surexcité pour en survolter encore plus les synapses.

Prenez une solide dose de post-bop, tendance free.
Glissez-y des harmonies hébraïques, arabes, moyennes-orientales, je ne sais...
Enfermez-moi l'imparable section rythmique Greg Cohen / Joey Baron;
ajoutez la trompette incisive de Dave Douglas;
le tout sous la direction musicale de cet être survolté, capable de tout, John Zorn...

Ah oui, et l'enregistrement: première classe!

Voici Masada. Dans ce cas-ci, le volume 6 (vav). Un des mille projets parallèles menés par ce maître cubiste des musiques improvisées (je parle encore de Zorn bien sûr)...

À écouter, encore et encore, le solo de Baron, avec le soutien de la basse de Cohen, sur la 5e piste ("Nevalah")... haute pyrotechnie percussive parfaitement rendue sur disque, excellent pour mettre en valeur votre système de son; et le solo magnifiquement inspiré et lyrique de Douglas sur la 6e pièce ("Miktav")...

(Lorsque j'aurai le temps, je vous parlerai de ce que j'écoute vraiment constamment ces temps-ci: le fantastique, l'hallucinant troisième disque de Portishead, un chef d'oeuvre dense, épeurant, émotif, mêlant la violence de beats krautrock déjantés et la voix fragile, passionnée, toujours sur le point de casser, de la grande Beth Gibbons. À écouter avec une dose sévère de Nine Inch Nails récent (Ghosys, The Slip) et du Can à volonté.)

samedi 10 mai 2008

Sur la platine... acquisitions récentes... Nina Simone...


Nina Simone. Le nom évoque une musique noire, noire dans l'âme, noire tristesse, noir combat. Difficile d'imaginer Nina Simone souriante tant sa musique évoque le blues, le delta du Mississipi, le combat pour les droits civiques... La première fois que j'ai entendu Nina Simone, c'est en français... dans un magnifique clip de Denis Villeneuve, dans la regrettée Course autour du monde de Radio-Canada. Denis, qui n'en est pas à un flash génial près, avait retracé, quelque part en Afrique, la femme à qui était destiné la plus déchirante chanson d'amour de tous les temps, Ne me quitte pas de Jacques Brel; pour accompagner son clip, Denis avait choisi, non pas la version archi-connue du compositeur, mais la déchirante interprétation de la grande Nina Simone, sa voix de contralto émergeant du silence avec cette force passionnée qui fait presque peur, tant elle porte intensément sa force de vivre.

Nina Simone, donc... Une carrière tumultueuse. Une descendante directe de Billie Holiday, peut-être, mais avec le talent musical et la tessiture sombre de Sarah Vaughn... c'est aussi dans sa musique, ses conceptions musicales et son sens de l'ambiance que Cassandra Wilson puise sa source.

Nina était une pianiste accomplie, et on s'en rend immédiatement compte en écoutant son tout premier CD, Little Girl Blue, sur étiquette Bethleem. Elle relaie même sa voix d'une fugue jazzée sur une des pièces. C'est ce qui joue en ce moment sur ma platine: versatile, allumée, mais déjà cette voix chocolat. Elle n'a que 24 ans, et déjà, tout est là, y compris cette manière derendre chaque interprétation vraiment sienne! Moins une patine de souffrance, une chape de plomb qui va la faire ployer plus tard. C'est peut-être ce qui rend ce disque si agréable à l'écoute: c'est toute la densité de Nina Simone, mais avec de la lumière. C'est un excellent enregistrement en trio, 1957, stéréo, avec un son immédiat et plein. La légende veut que le vinyle mono Bethleem (PAS la réédition des années '80) soit la plus belle version, soniquement parlant.

Nina enchaine ensuite avec une série d'albums pour le label Colpix. J'ai trouvé sur E-Bay, pour 12$, cette excellente compilation: The Nina Simone Collection 1959-1964 (Colpix Label)... 9 albums de représentés, 38 pièces, dont un grand nombre de "live" en trio; le style Nina Simone s'affirme, tant dans sa voix que dans son choix de matériel. La palette de Nina a toujours été très large: showtunes de Broadway, standards jazz, blues traditionnels, pop songs. Mais durant les Colpix years, il y a un point d'équilibre, avec peut-être une dose supplémentaire de blues, qui rend ces années très cohérentes et riches. Tranquillement, ses convictions politiques, les combats pour l'équité viennent colorer le message, et peut-être assombrir la messagère. Mais de temps en temps, une pièce lumineuse avec cordes ("Tomorrow") arrive, ou une showtune qui semble tirée d'un western ringard ("Chilly Winds Don't Blow") nous rappellent la grande versatilité de l'artiste. Mais c'est quand même les blues dépouillés qui nous prennent le plus aux tripes. Excellent voyage à travers des années riches où la musique pop, le jazz et le blues cohabitaient facilement.

La suite, c'est la période classique de Nina Simone, les années Phillips. C'est la grande période des grands classiques inoubliables qui ont marqué les interprètes futurs: Ne me quitte pas, I Loves You Porgy, Strange Fruit (de Billie Holiday), Lilac Wine (repris par Jeff Buckley 30 ans plus tard), Don't Let Me Be Misunderstood, Wild Is The Wind (repris par Bowie), I Put A Spell On You (scary!). Ce sont des albums fantastiques dans des années intenses de combats civiques, les grandes années de l'Amérique tiraillée entre les idéaux de ses grands leaders (Kennedy, Luther King) et les forces obscures et républicaines. Nina Simone est à son sommet absolu, et l'achat obligatoire, c'est le coffret Four Women: The Nina Simone Phillips Recordings (35$ chez CD Universe), qui comprend intégralement les 7 ou 8 albums de cette période, dans un excellent remastering.

Mais je n'ai toujours pas ce coffret, et en attendant, je me rabat sur cette compilation bien connue, The Best Of Nina Simone, qui est sans doute la meilleure introduction à Simone pour le novice, et qui ne vous coûtera même pas 10$.

On enchaîne sur une autre compilation double, The Very Best of Nina Simone - Sugar In My Bowl (1967-1972). Cette fois, votre humble audiophile doit admettre que la magie cesse d'opérer. L'excellent et le médiocre se suivent de près durant cette période, où, apparemment, Nina étend un peu trop ses ailes et commence à perdre de l'altitude. La direction musicale devient moins claire à force de s'éparpiller dans tous les sens. Dylan, les Beatles, Cohen s'ajoutent à ses interprétations, mais la greffe prend moins. Peut-être qu'au fil des écoutes je découvrirai des perles cachées, une subtilité musicale qui m'échappe pour le moment. Mais dans ce déluge de Nina que j'ai acquis récemment, c'est l'item qui reste bien sagement dans sa place dans la discothèque... pour le moment.


Nina Simone. Tout dépend de ce qui fait votre plaisir, en musique, de votre conception personnelle de ce qu'est un plaisir musical. Mais dans un monde de chanteuses athlétiques qui voient la musique comme une compétition sportive, des chanteuses comme Nina Simone sont nécessaires pour nous rappeler qu'il y a aussi une lignée de chanteuses racée qui avaient quelque chose à dire, esthétiquement, spirituellement, politiquement. Au royaume du divertissement et du prêt-à-jeter, il est encore possible de trouver un sens à la musique.

Nina Simone est décédée le jour de mes 39 ans, en 2003.

mercredi 23 avril 2008

Toumani Diabaté - The mandé variations





La beauté est de ce monde. Et à entendre la musique qui émane de là-bas, elle pourrait bien se trouver au Mali.

Je n'ai jamais mis les pieds là-bas, remarquez... mais pour la dernière heure, j'en étais bien près. Aussi près que possible, sans quitter l'ennui petit-bourgeois de Saint-Lambert.

J'ai passé la dernière heure en compagnie de Toumani Diabaté. Et de ses Mandé Variations.

Diabaté, pour ceux qui ne connaissent pas, il est un peu au Mali et à son instrument, le Kora, ce que Ravi Shankar fut à la musique indienne et à la cithare. Un virtuose. Un ambassadeur. Un musicien dont le jeu dépasse complètement les cadres normaux de la musique. Comme Shankar. Comme Coltrane.

Issu d'une grande famille de griots et musiciens maliens (son père était un maître du kora, sa mère chanteuse), Diabaté a enregistré, à 21 ans (en 1988) le tout premier disque entièrement dévolu au kora, comme instrument solo. On dit son jeu respectueux de la tradition, mais en même temps capable de la transcender, de l'amener dans de nouveaux mondes sonores. Il multiplie aussi les collaborations internationales (même Björk a fait appel à lui sur son dernier disque). Encore là, il rappelle Shankar.


Diabaté est un virtuose incroyable, capable à l'aide de la seule kora (une sorte de harpe, aux sonorités parfois métallique et perçante comme la harpe, mais parfois douces comme une guitare six cordes) de jouer mille variations de lignes de basse, d'accompagnement et de mélodies, en même temps (ce qui m'a rappelé la cithare), avec d'infinies détails de timbres, de rythmes et de micro-dynamique. Si votre système peut vous le faire entendre, vous ne pourrez qu'être fascinés par les mille subtilités de l'instrument, par sa richesse tonale et harmonique. Un instrument-orchestre. Diabaté utilise d'ailleurs deux koras, aux sons différents. J'ai un petit faible pour la kora traditionnelle. Plus près de la guitare. Plus lumineuse.

Mais, et c'est là toute sa valeur, l'art de Diabaté dépasse complètement le cadre de la seule musique; c'est lumineux, c'est empreint de cette sorte de rayonnement qui vous amène presque aux portes de la méditation. C'est spirituel, quoi, n'ayons pas peur des mots... c'est presque mystique. En fait, c'est trop beau pour n'être que de la musique. C'est la vie, quelque part, dans ce déferlement de cordes pincées. Je vous jure.

Les Mandé Variations se partagent entre morceaux inspirés de la tradition du kora, compos récentes et impros libres. Il ya même une citation de Enio Morricone. Diabaté a voyagé! Il a assimilé. Et son art n'en est que plus riche!

Bref... c'est une heure absolument transcendante. Je vous le conseille absolument!


dimanche 6 avril 2008

FSI: une visite éclair


Feed-back de profane, ça vous dérange pas trop les gars? Alors voilà le mien!

D'abord, coincer ça en 4 heures est le genre de calcul qui ne fonctionne pas, comme j'en ai fait l'expérience douloureuse cette année. Me suis arrêté au 9e étage, dans la salle oracle. Mais, bon, la famille, pas mal de vin hier, et tout...

C'est une vraie torture ces salons. On n'a jamais assez de temps pour vraiment apprécier ce qu'on aime, ni pour donner une 2e chance à ce qu'on n'aime pas. On doit se refaire une oreille vierge à chaque salle et faire avec le choix musical qui est tout un piège: comment comparer avec des disques qu'on n'a jamais entendu? Je m'étais fait une compil', mais je ne l'ai pas souvent sorti: pas le temps!

Moi, je m'excuse, mais les Kef m'ont jeté sur le cul. Chance: les deux disques entendus, je les connaissais par coeur, en avant, en arrière: Eleanor Rigby des Beatles, les Marquises de Brel. C'était écoeurant! Tout y était: tonalités, soundtstage, présence, cohérence. Quand on pense aux électroniques très modestes qui les poussait, wow! Bon, à 140K la paire, est-ce qu'on s'attendait à moins? Non!



J'ai adoré les WATT, mais j'ai seulement entendu un solo de drum! Alors, ça avait la pêche, mais si les HF sont à chier, je vous crois sur parole...



La salle GAMUT a été un bon moment pour moi, mais le choix musical me convenait tout à fait: un jazz assez hard avec beaucoup de brass, live. Beaucoup de vie là-dedans. Oh fuck, je viens de voir le prix des enceintes: 130K$ Ok, au suivant!



J'ai été surpris de voir le nombre de salles mettant en vedette du Moon et du Verity Audio. Trop, c'est comme pas assez! Sauf les Verity Lohengrin dans la salle LAMM. Là j'ai pris mon pied. Euh, les enceintes sont 80K$$$ Bon...



Bon faut revenir sur terre... Je cherche la salle avec des LS 3/5a et tombe sur les Harbeth Super HL5 ($5K la paire). Pour qui a été nourri au biberon des Rogers et du son british BBC, impossible de résister. Et puis, pas trop de monde, je peux enfin sortir ma compil. D'abord, du Sonny Rollins mono (Saxophone Colossus)... Évidemment, pas de problème pour les Harbeth, le jazz acoustique hard bop, c'est en plein dans leurs cordes. Avec du Audio research comme amplis (d'ailleurs, à chaque fois qu'il y avait Audio Reasearch en amont je trouvais que ça swingait en diable... surtiout avec les Sonus faber, outch!). Puis mon disque killer de système, le Cassandra Wilson, Thunderbird... Eh ben voilà... le Harbeth le rendait sans souffrir le moins du monde... C'était pas la parfaite transparence, mais j'ai entendu pour la 1ère fois "Strike A Match" "débouché"... Bravo!




Un peu plus loin, le kit écono dont tout le monde parle: électroniques Exposure et enceintes Neat Motive 2. J'avais encore les Harbeth en tête, j'ai resorti le Cassandra... Là, le représentant m'a presque fait une bouderie... "c'est quoi ça? t'as tiré ça de ton ordi? le son est poche, y'a aucune transparence..." Visiblement, après une fin de semaine de lauriers et d'accolades, il avait pas envie d'entendre son système à son désavantage et préférait blâmer mon rip (parfait soit dit en passant), alors on a vite enchainé avec Sonny Rollins, où le petit kit a retrouvé ses couleurs... C'était pour lui faire plaisir. Mais malheureusement, mon initiation aux Neat a été décevante...



Autre (grosse) déception. Tenor... les meilleurs amplis à tubes au monde ais-je lu? Ben pas avec les enceintes Avalon, qui faisait des hautes fréquences à haut degré de friture, ce que Stereophile qualifie de "a little recessed".



Et puis, pourquoi, pourquoi mettre le son dans le tapis à la moindre occasion? La fatigue auditive ne permet pas d'apprécier le son à sa juste mesure, non? Je ne pouvais comprendre les représentants qui crinquaient jusqu'au point de distorsion... Anyway...

L'épuisement me gagnant peu à peu, je me suis retrouvé, 16h45, chez Audio d'occasion, devant le kit Oracle et les panneaux Final... J'ai mis le Bacchanas Brasileiras par Wayne Shorter. Saxo, percus, violoncelle, dans un magnifique enregistrement... Et là, j'ai croulé de plaisir... La transparence, l'équilibre, l'étendue dynamique (j'ai enlevé le sub, sans rien perdre)... J'ai eu un petit moment de fierté patriotique. Les produits Oracle sont fantastiques, et je rêve, je RÊVE de m'offrir leur DAC... Un petit moment de perfection après plusieurs salles à se faire marteler les tympans...



Peut-être suis-je un amateur de panneaux qui s'ignore! Faudra investiguer!

Bon, alors ce n'était que mon 2e salon de l'audio, alors je suis loin d'avoir fait le tour. Naim, Linn, YBA, pas eu le temps... Alors j'y retourne l'année prochaine!

(les photos sont tirées du blogue de Stereophile)

mercredi 26 mars 2008

Tenor Madness... hard-bop chauffé à blanc!


Le Hard-Bop à son meilleur...

La quintessence du combat amical entre deux souffleurs, qui en plus étaient des gentlemen...

Deux ténors aux voix distinctes, et dont les chemins se croisent pour la première et la dernière fois...

Sonny Rollins et la section rythmique de Miles Davis, circa 1956 (Red Garland, Paul Chambers, Philly Joe Jones), avec en ouverture 12 minutes d'un duel enlevant de ténor:

Sonny Rollins, la vedette de l'époque vs.
John Coltrane, le jeune loup, si controversé, du Miles Davis Quintet.

Fascinant de comparer la différence de style entre les deux...

John Coltrane, sonorité plus pincée, style plus énergique, et qui semble précéder le tempo
vs Sonny Rollins, son plus ample, plus majestueux, et jouant du temps comme s'il en avait à revendre. L'incandescence vs la puissance dans un dialogue où on n'a pas plus de mal à identifier les protagonistes que s'ils utilisaient leurs propres voix!

That said, Coltrane’s fearlessness is front and center as he takes the first solo, firing flurries and fusillades from the high end of his tenor sax. He is definitely on his game for the time. He's a willing teammate as he trades fours with Rollins on an ending dialogue where the two players happily finish each other’s thoughts.
The proof of the pudding is in Rollins’ first solo. Taking the tonal low road to Coltrane’s high attack, Rollins’ tenor has a shape and substance Coltrane lacks. This not only adds to the contrast that should otherwised elude this instrumental airing, but also demonstrates the scope of Rollins’ sound. At this point Trane had chops, but Rollins had soul, and the disparity is conspicuous.
Parfaitement résumé, si vous voulez mon avis! En plus, c'est un disque OJC (Original Jazz Classics), un petit moment de bonheur audiophile mono!




samedi 15 mars 2008

ESt-ce que la maximisation apporte plus de résolution?

Une petite référence dans notre discussion intermittente sur les effets de la compression sonore dans la qualité des disques laser...

Un des arguments de Nick Davies dans sa compression du son dans la série des SACD de Genesis est d'utiliser pleinement les 16-bits du format; sous prétexte qu'un volume trop bas nous éloigne de cette pleine résolution.

Barry Diament, qu'on aime parce qu'il fait sonner Genesis comme pas un, réfute...

Voici son explication:

While 6 dB does add up to 1 bit of resolution, I believe this bit ( ) of information is often taken out of context and misrepresented.

The logical extension of the common argument would say that unless we compress the dynamic range to 6 dB or less, we're not using all of the available resolution on a CD. (Oh, wait a minute. The majors are compressing the dynamic range to 6 dB or less, aren't they? Actually, with many current releases, 6 dB would be an expansion. )

As you can see, it becomes a silly argument rather quickly, especially if you want to have a dynamic recording.

As to digital masters after noise shaping being "effectively 14-bit", here again, I must disagree. This too is what I call a "reductionist" perspective on a picture that is much larger.

If an original recording is made in high resolution (say 24-bit) and one wants to make 16-bit CDs, the options are:
1. to simply truncate (i.e. "throw away" bits 17-24), which will wreck the tonality and soundstaging
2. to dither (adding about 4 dB of noise overall), which if done properly will preserve much of the low level information that would otherwise be lost
3. to dither and noise shape, which if done properly will keep the benefits of good dithering while making the added noise considerably less noticeable.

To suggest a reduction in resolution with noise shaping is to imply one will not suffer any loss by avoiding noise shaping. In my experience, it is the opposite that is true.

I hear resolution as being primarily a function of the quality of the original recording (i.e. what leaves the microphones), the quality of the A-D conversion and how carefully everyone in the chain works to preserve what was recorded.

Many of the best sounding recordings I own do not spend much time near the top of the meters and all of them involved some kind of noise shaping for reduction of the original to 16-bit for the CD.

Best regards,
Barry
www.soundkeeperrecordings.com
www.barrydiamentaudio.com