Quel album extraordinaire!
Débarrassé de l'héroïne, secouant le joug bienveillant mais sûrement pesant de Miles, transformé peut-être par son bref, mais fructueux passage avec Thelenious Monk, John Coltrane entre en studio avec l'élégant Tommy Flanagan (qui dut quand même sen sentir un peu bousculé!), l'impeccable Paul Chambers et le dynamique Art Taylor et enregistre l'énorme album Giant Steps; un miroir diffracté, chaotique, sur-vitaminé du célèbre Kind of Blue auquel il participe. Dans sa toute nouvelle confiance, 7 titres ramassés, assez brefs, où se concentre la folle énergie d'un dingue qui peut pratiquer une vingtaine d'heures par jour son ténor. Il sera plus tard, au sein de son quatuor classique, plus généreux, empathique, spirituel, emporté, événementiel; mais a-t-il été déjà plus punché que sur cet audacieux brûlot?
J'écoute en ce moment les 2 minutes 11 de Countdown. 2 minutes 11 où Trane parcourt les gammes à toute vitesse, sur une rythmique ultra-speedée, pour finir, dans les dernières secondes, par énoncer le thème! Nous sommes constamment ainsi, tenus en déséquilibre, par ce grand homme qui vient de trouver sa voie, sa voix, si indissociable chez le saxo de son souffle, et qui nous le fera partager, sans concession, pour les huit années suivantes, jusqu'à sa mort prématurée.
Coltrane, formidable auteur de ballades, formidable souffleur de thèmes poignants, en commet un seul sur cet album: la célèbre Naima, qu'il enregistre d'ailleurs avec la section rythmique de Kind Of Blue: mister PC, Wynton Kelly, Jimmy Cobb.
Morceau fascinant que ce countdown.
RépondreEffacerColtrane nous met KO.