lundi 28 juin 2010

Biolay, Gainsbarre pour une époque sans humour


On aimerait bien prendre Benjamin Biolay en grippe...  sa petite gueule de jeune David Gilmour atteint de womanizing aigu, accumulant les histoires d'Amour qui finissent mal, traînant sa gueule tourmentée et inexpressive sur tous les plateaux, jusqu'à nous l'imposer dans un film franchouillard insupportablement poseur (Sang froid, 2007)... et puis cette prétention à sauver la chanson française de la médiocrité...

Mais Biolay, après avoir particpé à la résurrention de Henri Salvador au début de la décennie, avec l'excellente Karen Ann (c'était Chambre avec vue), est maintenant un songwriter et un interprète substantiel... si substantiel qu'il lui a fallu coucher sa créativité sur un CD double l'an dernier, un double abondant, sans  temps mort ni déchet... Ça s'appelle La Superbe, et ça fait un peu mal, parce que ça parle abondamment d'amour, mais d'amour qui s'épuise, qui se fixe mélancoliquement vers son auto-destruction... comme si la mélancolique et gainsbourienne Je suis venu te dire que je m'en vais avait trouvé sa voix contemporaine; ou comme si l'élégiaque Manon finissait de se noyer dans les eaux délétères du 21e siècle. C'est un Gainsbarre lourd et ma fois assez triste, sans le fun orgiaque des années soixante, avec juste cette pointe d'hédonisme contemporain, qui  fait dire à Biolay qu'il a beau compatir avec la peine de sa belle (celle qu'il inflige bien sur), à partir de vingt et une heures, il n'a plus que sa queue.

Bref... mélodies sinueuses et qui s'inscrivent en vous, arrangements riches, somptueux, fouillés, variés, influences multiples mais parfaitement digérées (Bashung pour La Superbe, Gainsbarre pour tellement d'autres)... même lorsqu'il frôle le kitsch musical (Miss Catastrophe, Brandt Rhapsodie), son art du texte vient prendre la relève et vous mettre un une-deux dans le ventre..

S'il avait seulement une pointe d'humour, ou même d'ironie... bon, on peut pas tout avoir!

On aimerait l'haïr, ou au moins le jalouser en paix... mais on aime trop la chanson pour ça...

Aucun commentaire:

Publier un commentaire