ou comment
Bertold Brecht a changé la vie de
Bob Dylan...
Bertold Brecht et Kurt Weill, expatriés du nazisme
Passionnantes
Chronicles de Bob Dylan... dans lequel Dylan, raconte, avec son style si puissamment imagé, la naissance de son style, ses influences, l'empreinte durable d'un
Woodie Guthrie, d'un
Robert Johnson... ses premières années à Greenwich, ses nuits de
coach surfer, la quête d'engagements; puis,
fast-forward, 25 ans plus tard, un Dylan célèbre mais désenchanté, l'épuisement de l'inspiration, la panne sèche, le dégoût, l'impuissance créatrice, jusqu'à sa rencontre avec un Shaman canadien-français (
Daniel Lanois) qui accouchera de son phénix artistique,
Oh Mercy.
Mais peut-être la section la plus révélatrice est la dernière du livre, qui nous le présente, jeune morveux ambitieux du nord du Minnesota, pays dur, austère, où la gauche et les syndicats sont particulièrement dynamiques ( visionnez l'excellent
North Country avec
Charleze Theron pour vous faire une idée). Le jeune folk-singer qui débarque à New York et qui se forge une identité: interprète pur et dur de Guthrie, folk-singer pénétré d'idéaux socialistes. Dylan, qui découvre la Grosse Pomme et qui, sous l'influence de sa petite amie du moment, fréquente les théâtres... et assiste, tétanisé, au
Three-Penny Opera de
Bertold Brecht et
Kurt Weill, une oeuvre de 1928...
Dylan, qui se passera en boucle le vinyle de
Pirate Jenny dans les semaines qui suivent... Les mots de Brecht, la musique de Kurt Weill, les expatriés du nazisme, qui viennent libérer, par la violence de leurs sentiments, leur âpre réalité et leur imaginaire débridé, la plume du jeune Zimmerman...
Et qui est Pirate Jenny? Jenny, pauvre hère, qui fait les lits d'un hôtel de passe miteux, en échange de quelques pennys... méprisée, miteuse... mais qui la nuit, à sa fenêtre d'hôtel, sourit en regardant le port, et les bourgeois qui se demandent ce qu'a cette va-nu-pieds, à sourire de la sorte...
Jenny, à qui on amène des bourgeois enchaînés la nuit, en lui demandant:
Le tuons-nous maintenant ou plus tard?
Et Jenny, de répondre d'une voix froide, glaciale: RIGHT NOW.
Écoutez la version live de Nina Simone, de 1964. Ça pourrait vous filer des cauchemars... Brrr..
(Essayez d'imaginer une de nos divas à voix interpréter un tel texte aujourd'hui...
sigh)